Ce qui nous lie - Samantha Bailly

Oui, si vous avez lu les colonnes juste au-dessus, je n'ai pas aimé un certain nombre de choses, mais je vais m'expliquer. D'abord, pourquoi je suis tombée sous le charme ? 1) le titre -surprise !-, 2) la couverture, 3) le résumé.

Franchement, cette idée de voir les liens qui unissent les gens, c'est vraiment trop fort : original, tellement attirant, ça donne envie de posséder ce pouvoir soit-même. Deviner l'intimité des gens, deviner leurs sentiments à votre égard, à l'égard des autres, leur relation avec leurs proches : un pouvoir terrible qui permet de découvrir les hypocrites, mais également les vrais amis. Bon, on découvre ensuite un autre pouvoir, celui d'associer un mot qui définit la conduite de chacun. J'aime un peu moins l'idée, je trouve que c'est très - trop - réducteur. Je pense qu'il est absolument impossible de définir un être humain d'un seul mot, sauf bien sûr les personnages de cette histoire puisqu'ils me paraissent presque des caricatures.

Premier point sur lequel je butte donc, les personnages. On a une héroïne mal dans sa peau, qui prend un masque de déesse vengeresse. Je n'aurai absolument rien eu contre si ça avait été le centre de l'histoire, mais même pas. Au moment où on commence à la suivre, elle quitte ce masque et abandonne sa double vie. Quant aux autres, vraiment pas assez nuancés, entre le dragueur relou de service, le beau mec ténébreux, le coureur de jupon, la nana froide et distante, et enfin, la potiche du lot qui couche avec tout ce qui bouge. En fait, mes personnages préférés sont ceux qu'on voit le moins, à savoir John l'ami d'enfance, et le serveur. Bon, et Alice aussi, j'admets qu'elle m'a un peu émue, puis elle essaie d'évoluer, elle se bat pour changer, pour avancer, pour réfreiner ses pulsions et ses envies, pour ne pas retomber dans le même schéma. On sent le passé amoureux difficile, même si c'est un peu sa faute et qu'elle a été bien cruche quand elle était ado. Heureusement que son passé est raconté par petite touche d'ailleurs, sinon j'aurai fait une overdose. Cependant, j'aurai aimé davantage de passages avec John, parce que vraiment je l'aime bien. Mais ça aurait cassé l'équilibre du roman, parce qu'il y en a un malgré ce que je raconte : tout est plutôt bien dosé. En fait, si j'y réfléchis vraiment, je me dis que je n'aimais pas les personnages au début, parce que caricaturaux, puis finalement je me rends compte que sur la fin, certains sont quand même sympathiques : j'imagine- j'espère - que c'est voulu, pour montrer qu'il faut se méfier des apparences, peut-être. Mais l'impression du début reste prédominante malgré tout.

Qui dit personnages et liens visibles, dit relation : il semble logique que cela soit le thème principal du roman. C'est le cas, en cela on n'est pas déçu. Mais la seule que j'ai trouvé pleine de vérité, troublante et touchante, c'est celle de John et d'Alice, cette amitié trop profonde qu'aucun lien de fratrie ne vient protéger de l'amour unilatéral. Puis aussi la relation entre Alice et sa grand-mère, qui m'a tiré quelques larmes. Sinon, je trouve que le roman est bien trop court pour montrer des évolutions dans des relations humaines, à part celles qui sont montrées : des pulsions animales, du désir, du sexe, et du rejet. Construire vite, détruire facilement. J'ai trouvé que la fin allait un peu vite, alors que ce n'était pas nécessaire, j'aurai voulu en avoir un peu plus au sujet de Séb. Toujours est-il que j'ai eu l'impression qu'on me racontait les histoires de coucheries au travail entre des jeunes qui n'ont que ça à faire et uniquement ce sujet de conversation. Je ne doute pas que ça existe vraiment comme situation, mais ça ne m'intéresse pas du tout. Ce n'est même pas une jolie romance, ou une romance dramatique, ça se résume vraiment au sexe, loin de ce que je cherchais. Quitte à avoir du sexe pour du sexe, j'aurai préféré lire l'histoire de notre Laura vengeresse, celle du début, voir sa double vie la détruire peu à peu, ou la renforcer au besoin; ça m'aurait davantage passionnée. 

En ce qui concerne la plume, je ne connaissais pas du tout Samantha Bailly, j'en avais juste entendu beaucoup de bien. Je suis tombée sur un style d'écriture très haché -première personne oblige ? - qui n'est pas du tout à mon goût. J'ai bien aimé les ambiances cependant, Marseille, les bars, les jours de pluies, c'est très bien rendu. Du coup, j'espère que ce style est uniquement celui de ce roman et pas celui de l'auteure car j'aimerai beaucoup découvrir Oraisons, qui a l'air d'être une fantasy très bien ficelée. Toujours par rapport à la forme, plutôt qu'au fond, ce roman se déroule sur trois couches temporelles différentes : le présent, où l'on suit l'histoire d'Alice, le passé avec ses souvenirs et enfin... le futur, souvent quelques jours - mois - après le présent. C'est très original, mais si l'idée était de créer du suspens, ça n'a pas marché sur moi, ça m'a plus perdue qu'autre chose, j'ai trouvé ça dommage. Mais l'idée est sympa.

Un autre tout petit point que j'ai adoré : il y a quelques références à l'Ombre du vent, de Zafon.

Voilà, ça fait une chronique un peu longue pour un si petit roman, mais j'avais des choses à exprimer. Donc un roman assez éloigné de ce que j'attendais, mais qui n'est pas mauvais pour autant. Je tenterai peut-être une relecture un jour, voir si ma position a changé par rapport aux personnages. Pour conclure, une lecture très rapide et facile; je ne vous le conseille pas vraiment, mais je vous encourage à vous faire une opinion. Dernier point : un film est sorti en juin, avec le même titre : non, ce n'est pas l'adaptation - une adaptation que j'aimerai bien voir d'ailleurs, moi qui ne suis pas très ciné, et pour un livre que je n'ai pas adoré... c'est drôle.

Méli